Aujourd’hui, j’ai envie d’aborder le sujet de la musique, pour plusieurs raisons. D’abord car la musique est probablement l’une des sources les plus importantes de joie dans la vie pour Nathan (à quasi-égalité avec la bouffe). Ensuite, son père (moi pour ceux qui ont loupé les épisodes précédents) adore composer de la musique depuis longtemps, dont certaines dédiées à mon petit. Et pour finir, la musique peut parfois être vue (ou plutôt entendue) comme une forme potentielle de thérapie ou d’expérimentation.
Pour moi, la musique a toujours été une forme de langage universel. Elle permet de raconter des histoires sans mots, elle permet de faire ressentir des émotions. Cela semble donc être parfait pour Nathan. Pour ma part, j’associe presque systématiquement un univers visuel aux musiques que j’écoute. La musique me transporte, elle peut me calmer comme elle peut m’exciter et parfois m’inspirer ou booster ma créativité. Elle peut vous donner envie de bouger, de danser.
Avec les copains de La Confrérie, nous en avions déjà parlé dans notre épisode 2 ½ : L’épisode deux et demi où mon copain Etienne tentait de nous expliquer pourquoi nous aimions la musique, ses influences culturelles, ses origines, l’inspiration du compositeur, etc. le tout sous un aspect scientifique. Je vous invite à écouter cet épisode si vous aimez notre style un peu « décalé » 😉 Par exemple, nous abordons les lézards moniques, une espèce encore trop peu connue du grand public malheureusement.
La musique est une symphonie harmonieuse de sons issus de vibrations de l’air. Ces vibrations sont presque magiques je trouve. Parfois, notre corps va ressentir ces vibrations comme un message.
Nathan et son rapport à la musique
Pour rappel, Nathan, dans sa joyeuse panoplie de soucis liés à sa maladie génétique inconnue faisant de lui un enfant polyhandicapé mais magnifique au demeurant, souffre de syndromes autistiques. Tel un bourgeois qui vous snobe, il ne sait pas parler et vous accorde également peu d’attention directe. Les rapports sociaux le soulent prodigieusement. Autre possibilité : il en est peut-être capable mais ne désire manifestement pas le faire avec ce monde absurde qui l’entoure. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas du tout de formes de communications. Elles sont juste bien plus complexes et longues à appréhender. Cela va se manifester par des bruits qu’il fait, des petits sons, quelques lettres émises avec plusieurs intonations, des attitudes, des expressions de visage, des mouvements de son corps. Ces derniers temps, il nous fait l’immense plaisir de nous fixer dans les yeux, parfois quelques secondes. L’échange est alors intense et me remplit de bonheur à chaque fois !
Dans sa bulle, Nathan adore les vibrations, ce qui nous ramène donc aux bases de la musique. Malheureusement, certaines d’entre-elles ne nous sont pas agréables. Par exemple, il adore grincer des dents ! Moi qui détestais cela, j’ai mis du temps à m’y habituer. Mon analyse de ce comportement est que cela génère des vibrations dans sa boîte crânienne qu’il aime et qui le rassurent. Il adore aussi gratter plein de choses. Bien sûr, il aime tout simplement la musique. Depuis tout petit, il raffole des jouets musicaux pour bébés en tout genre. Certains deviennent clairement ses jouets préférés, voir deviennent indispensables pour lui dans son quotidien.
Il y a un phénomène qui m’impressionne toujours avec lui, c’est sa capacité à n’aimer qu’une seule des musiques et à la repérer à la vitesse de la lumière. Il va appuyer sur les boutons super vite pour faire défiler toutes les musiques du jouet. Dès la première note de sa musique préférée, il s’arrête et la laisser se jouer. Effet de bord de cette capacité rigolote : nous entendons la même musique en boucle depuis des années. Bienvenu dans les joies associés aux syndromes autistiques !
Nathan adore également les comptines musicales. Il y a donc toujours une tablette qui traine avec YouTube et les Titounis. A nouveau, quelle joie et bonheur de vivre depuis des années dans le monde des Titounis ! 😊 Je comprends que nos vies de parents d’enfants autistes soient si enviées.
J’ai également passé d’excellents moments avec Nathan en lui faisant écouter la musique que j’aime. Dans mes meilleurs souvenirs, « Smells Like Teen Spirit » de Nirvana joué assez fort sur des enceintes haut de gamme Devialet Phantom. Nathan était mort de rire, c’était magique ! J’ai une vidéo de lui pendant cette écoute que j’adore. En voici, une autre de lui en train d’écouter cette reprise de « The Sound Of Silence »
Ceux qui connaissent Nathan savent qu’il est super content dans son comportement, dans ses cris si caractéristiques et dans sa façon de gigotter 😊
Grâce à différents tests, j’ai pu ainsi découvrir qu’il aimait d’abord le bon son issu de systèmes Hi-Fi de qualité (un bourge je vous dis !) ainsi que les musiques à fortes variations de dynamiques. Je suis persuadé que les fortes variations lui provoquent les émotions les plus fortes, ce qui l’amènent parfois à éclater de rire.
Également, d’après mes tests scientifiques de haut niveau, il aime le rock, la pop, le classique mais apparemment pas beaucoup d’électro. Personne n’est parfait, même mon fils !
Mes musiques et Nathan
Je compose depuis tout jeune de la musique sur mon ordinateur, sans base de solfège, à l’oreille uniquement. Grâce à Sylvain et Farid, des bons copains, j’ai récemment découvert la fantastique application Simply Piano qui permet d’apprendre les bases de manière ludique et très efficace. J’espère donc pouvoir corriger cela et m’améliorer. En attendant, ma technique consiste à fredonner un air sur mon iPhone et à tenter de la rejouer dans un logiciel spécifique.
La musique que j’ai dans la tête correspond à beaucoup de choses différentes. Pendant longtemps, mon entourage sentait ma tristesse lorsque j’essayais de composer quelque chose en pensant à Nathan. J’ai apparemment moins de filtre et je fais moins le malin lorsque la musique s’exprime. Par exemple, celle-ci semble avoir marquer certains de mes amis : https://soundcloud.com/david-rousset/feelings-for-my-son qui étaient inquiets sur ma santé mentale et se demandaient si j’allais me tailler les veines 😉
C’est pour ça que je suis particulièrement content de ma dernière composition. Laissez-moi vous expliquer le contexte. Tout d’abord, je fais souvent un rêve où je suis en haut d’une colline, seul, triste du manque d’autonomie de Nathan et de l’incertitude au sujet de son avenir. Mais soudain, une musique épique est présente et je vois Nathan escalader la colline, d’abord à quatre pattes, avant de réussir à se redresser à mes côtés au prix d’un effort immense. On se retrouve alors l’un à côté de l’autre, prêt à aller affronter la vie.
C’est dans ce contexte que j’ai composé Réunion. Le titre symbolise plusieurs choses. En premier lieu, notre fameuse réunion en haut de la colline avec Nathan. Mais si vous écoutez la musique, vous entendrez des voix au démarrage. Ce sont celles de ma chérie Kristina et la mienne. J’avais envie de faire quelque chose en commun avec elle, de réunir ma musique avec sa voix que j’adore. Kristina étant une personne fabuleuse pour Nathan, j’avais envie qu’elle fasse aussi partie de ce projet. Pour moi, c’est comme si nos voix accompagnaient Nathan dans l’effort pour franchir cette difficulté, cette colline, avant qu’il ne prenne son envol. C’est la première fois que j’arrive à lutter face à ma grande tristesse intérieure pour réaliser une musique enfin positive et joyeuse pour mon garçon. Je ne vous raconte pas l’effort que cela demande mais j’en suis très fier !
Vous pouvez écouter cette musique sur SoundCloud.
J’ai ensuite fait écouter ma musique à mon vieil ami David Catuhe. Il n’était pas au courant de mon rêve associé à cette musique, ni de mes intentions derrière. Il m’a proposé de dessiner la cover de ma musique et là… Il a dessiné ces deux personnages en haut d’une colline sous le regard bienveillant d’un être magique et surnaturel. C’était parfait ! Et surprenant également ! En effet, j’ai trouvé incroyable que son dessin arrivait à approcher de l’image que j’avais pendant mon rêve sans que nous n’en ayons jamais parlé. Cela m’a donc conforté sur la puissance de la musique pour créer un imaginaire, pour faire passer un message. J’espère donc que Nathan arrive à ressentir cela de la même manière avec la musique qu’il écoute.

Expérimentations
Grâce à Yasmina, une vieille copine d’école d’ingé qui s’intéresse aussi à Nathan, j’ai découvert ce produit permettant de convertir des signaux électriques en notes de musiques via le protocole MIDI : MIDI controller TouchMe – Playtronica.

Cela faisait justement des années que je me demandais comment je pouvais améliorer le contact avec mon fils à travers soit la musique, soit une tablette car il adore ça. Le concept consiste à toucher un des côtés de l’appareil avec sa main et toucher une autre personne qui fait la même chose de l’autre côté pour faire passer le courant, à travers la peau, entre les deux. En fonction de la distance et de l’intensité du courant, cela génère une note différente. Je me suis dit qu’il fallait absolument essayer avec Nathan !
Bon pour l’instant, les essais ne sont malheureusement pas très concluants. Tout d’abord, forcer Nathan à prendre quelque chose en main n’est pas simple s’il ne l’a pas décidé lui-même 😉 Ensuite, cela demande malgré tout un effort de concentration. Mais nous essaierons régulièrement. Il a fallu parfois des années avant que certaines choses fonctionnent avec cette tête de mule.
Pour finir, j’ai pu rencontrer Mélanie Zadeh qui est réalisatrice mais s’intéresse également à la thérapie par le son en étant sonothérapeute. Moi qui suis un cartésien au plus profond de mon âme, je suis assez sceptique de nature sur des approches alternatives que je qualifie rapidement d’ésotériques. Mais après avoir longtemps discuté avec elle, je pense qu’il reste une part de mystère sur notre réaction aux sons, à la musique et aux vibrations. Elle n’a jamais cherché à m’imposer ou me convaincre, elle m’a simplement partagé son ressenti et ses histoires. Cela m’a ouvert l’esprit et je serai curieux un jour de voir l’effet de telles pratiques sur Nathan. Merci Mélanie !
Vous l’aurez compris, la musique est quelque chose de vitale pour Nathan et moi. Je garde encore beaucoup d’espoir afin de trouver comment exploiter cela au mieux et améliorer notre communication. En attendant, comme l’a dit l’un de nos plus grands philosophes contemporains : « je dis merci à la vie, je lui dis merci, je chante la vie, je danse la vie… Je ne suis qu’amour ! »
Au TOP David ! J’adore lire tes textes qui me touchent et me parlent beaucoup. Je te félicite pour ton parcours de Papa extraordinaire qui arrive à prendre le temps de poser ses émotions et sentiments sur des mots. Pas un truc d’homme ça !
Continues comme ça, tes écrits me donne l’envie de raconter également ma vie avec mon petit bout en laissant place à mes émotions, mes incertitudes et mon combat mental (et souvent physique !).
Alexandre, papa d’un petit monstre de 5 ans atteint de paralysie cérébrale.
J’aimeAimé par 1 personne
Merci pour ton mot Alexandre. Et cela DOIT être aussi un truc d’hommes 😉 Bon courage avec ton petit bout.
J’aimeAimé par 1 personne
Mets lui du mozart, ou la chevauchée des walkiris que ton grand père adorait. Peut être qu’il sera sensible à la grande musique aussi. Pour avoir assister à ses rires sur certaines musiques, ce sont des moments que l’on redemande.
Love
J’aimeJ’aime
Bonjour David,
je viens de terminer de livre un livre extraordinaire, porteur d’espoir.
Je me devais de le partager.
Amitié sincère.
Philippe
J’aimeAimé par 1 personne
Merci Philippe pour le partage!
J’aimeJ’aime